Monde arabe le patrimoine mutilé : «Le nettoyage culturel», la nouvelle guerre

zadhand

DZSatien Légendaire
Inscrit
10/8/10
Messages
1 168
Monde arabe le patrimoine mutilé
«Le nettoyage culturel», la nouvelle guerre

El Watan
le 31.03.17 | 12h00




Conseiller spécial auprès du directeur du Centre international d’études pour la conservation et la restauration des biens culturels (ICCROM), l’Algérien Mounir Bouchenaki vient de publier, à Paris, «Patrimoines mutilés, ces trésors de l’Humanité défigurés par la folie des hommes». Il y détaille les atteintes aux biens culturels dans les pays qui connaissent ou qui ont connu des conflits comme la Bosnie, la Croatie, le Cambodge, l’Irak, le Liban, la Syrie et le Yémen.

Mounir Bouchenaki a présenté ce livre lors d’une conférence organisée au Palais de la culture Moufdi Zakaria, à Alger. «Sous la direction de Amadou-Mahtar Mokhtar M’bow, j’ai lancé une campagne internationale pour sauver les villes historiques dans la région arabe comme Fez, Tunis, Le Caire, Tyr, Sanaa, Shibam et la Casbah d’Alger», s’est-il souvenu.La Casbah d’Alger a été classée parmi le patrimoine mondial de l’Unesco en 1992 grâce, entre autres, aux efforts menés par Mounir Bouchenaki. Les textes de l’Unesco ont évolué ces dernières années. Le patrimoine immatériel et le patrimoine sous-marin ont été ajoutés au patrimoine culturel qui se limitait aux monuments et aux sites. La Convention de la Haye de 1954 relative à la protection du patrimoine menacé par les conflits armés, qui fut la première convention adoptée par l’Unesco, a été dotée en 1999 d’un protocole additionnel pour l’adapter aux évolutions. Le texte a pris en compte les nouveaux conflits.
Un char d’assaut devant le Musée de Baghdad.
Après l’intervention militaire américaine en Irak, en 2003, le patrimoine culturel a été le premier ciblé. Mounir Bouchenaki a eu beaucoup de difficultés pour avoir les autorisations pour se déplacer vers ce berceau des civilisations. Il a rappelé que l’envahissement US de l’Irak n’était pas autorisé par l’ONU. «Le 8 avril 2008, j’ai vu à la télévision que les gens sortaient du Musée national de Baghdad avec des objets. Le lendemain, je suis allé voir le DG pour lui dire de faire quelque chose. J’ai réuni les experts dont des Irakiens de la diaspora à Paris. Nous avons lancé un appel d’alerte. Je suis parti ensuite à Baghdad. C’était une aventure incroyable, mais j’ai réussi. J’ai pris avec moi le directeur du British Museum, le directeur de Massachusetts Institute of arts, le directeur du centre italo irakien et le chef de la mission archéologique japonaise. C’est-à-dire les représentants des pays qui étaient dans la coalition avec les Etats-Unis en Irak.Les Allemands et les Français avaient protesté», a-t-il détaillé. « Nous sommes arrivés à Baghdad le 15 mai 2003 avec beaucoup de difficultés. Nous avons trouvé un char d’assaut américain devant le Musée», a-t-il ajouté. L’Irak était, à l’époque, placé sous l’administration du diplomate américain Paul Bremer, assisté de Piero Cordone, ancien ambassadeur d’Italie au Yémen. «Cordone était étonné qu’on débarque en Irak. Je lui ai parlé en italien et je lui ai cité les noms de mes enseignants en Italie. Le ton a complètement changé. Il a parlé à un colonel américain pour nous accompagner au Musée où nous avons rencontré le Dr Maher, directeur général des antiquités en Irak et Mme Moutwali, directrice du Musée, qui était désespérée. Je devais avoir un contact permanent avec le service de sécurité des Nations unies. Le représentant de l’ONU Sergio De Mello a été tué trois mois après», a souligné l’expert.Il a constaté que la bibliothèque de Baghdad a été entièrement brûlée. En juillet 2003, il revenait avec un représentant d’Interpol après avoir découvert que des œuvres d’arts avaient été pillés et que des fouilles sauvages étaient organisées dans les sites archéologiques. Dernièrement, M. Bouchenaki a visité Mossoul et Ninawa où des destructions ont touché la Mosquée du prophète Younes, Marqad Al Askari à Samar’a et les cités antiques de Nimrud et d’El Hadhr (Hatra). En mars 2015, les terroristes de Daech, qui se sont spécialisés dans la destruction et le pillage du patrimoine culturel et civilisationnel dans les pays arabes, ont attaqué au bulldozer les vestiges de la cité assyrienne de Nimrud, au nord de l’Irak. L’attaque a été perpétrée une semaine seulement après le saccage des statuts du Musée de Mossoul. Il y a 3000 ans, Nimrud, situé sur les rives du Tigre au sud de Mossoul, était la capitale de l’Empire assyrien qui s’étendait de l’Egypte actuelle à l’Iran. Une partie du patrimoine de Nimrud a été détournée par le colonialisme britannique.Les ‘‘Taureaux ailés’’, par exemple, se trouvent actuellement au British Museum. Avant d’entamer la démolition à Nimrud, les membres de Daech ont pillé des objets de valeur qui, selon des médias russes, se sont retrouvés dans le marché noir de l’art en…Europe. Ces objets datent de plus de treize siècles. M. Bouchenaki a rappelé que le Conseil de sécurité a adopté une résolution sur la contrebande des objets d’antiquités, en Syrie et en Irak, considérée comme une forme de financement des groupes terroristes.
«Drame culturel» en Syrie
«Il y a un véritable drame culturel en Syrie. Ce qui se passe dans ce pays est très grave», a souligné Mounir Bouchenaki. Il a rappelé qu’Alep, l’une des plus anciennes villes du monde, est classée dans la liste du patrimoine de l’Unesco. «Alep était parmi les plus belles villes du Moyen Orient. Il ne reste plus rien ! La grande mosquée, la Qala’a, l’ancienne cité ont été détruites», a-t-il regretté. En mai 2016, l’archéologue s’est déplacé à Palmyre avec un officier de l’armée russe. «J’ai rencontré le directeur général du patrimoine et des Musées de Syrie, Maamoun Abdelkarim. Nous avons constaté les dégâts à l’intérieur du Musée de Palmyre. Mais le site a été repris par les autorités», a-t-il noté. Le Musée a été transformé en prison par Daech qui, en octobre 2015, s’est attaqué à la cité antique de Palmyre, cinq mois après l’avoir occupé. Dans l’indifférence générale, les terroristes ont exécuté trois personnes en faisant exploser des colonnes de Palmyre auxquelles ils les avaient attachées. Auparavant, Daech a réduit en poussière l’Arc de Triomphe, les tours funéraires d’Atenatan, de Jamblique et d’Elahbel (uniques au monde) et les temples de Bêl et Baalshamin de la cité antique. Baalshamin était considérée comme le Dieu de la pluie et de la fertilité phénicien, assimilé à Zeus de l’époque gréco-romaine. Bêl était le dieu de l’oasis. Ne reculant devant rien, les adeptes d’El Baghdadi ont exécuté une vingtaine de soldats syriens dans l’amphithéâtre de Palmyre avant de décapiter Khaled Al Assaad, 82 ans, le chef des antiquités de Palmyre. La volonté d’effacer la mémoire culturelle de la Syrie est donc bel et bien inscrite dans «le plan d’action» de Daech qui a détruit également le monastère syriaque catholique de Saint Elian à Al Qaryataine, situé au centre de la Syrie. Le monastère date de plus de cinq siècles. En tout, plus de 300 sites et monuments culturels ont été endommagés par Daech en Syrie et en Irak ces dernières années.
Des pillages au Mali et en Libye
«En 2012, le comité du patrimoine de l’Unesco était en réunion à Saint Pétersbourg en Russie. Nous avons alors appris que Ansar Eddine était en train de détruire les mausolées et de brûler les manuscrits à Tombouctou. Des manuscrits ont été volés. Le comité a fait alors un appel international pour classer Tombouctou sur la liste du patrimoine mondial en péril», s’est rappelé Mounir Bouchenaki. Le Centre international de la construction en terre (CraTerre) de Grenoble (France) a aidé l’Unesco à reconstruire ce qui a été détruit dans la ville malienne dont le fameux Centre Baba Ahmed. Le chaos en Libye a également été mis à profit par des bandes organisées pour piller les objets d’antiquité. «La Libye recèle le plus grand nombre de sites archéologiques romains et grecs dans la région méditerranéenne. Certaines gens de la région sont en train d’utiliser d’anciennes pierres pour construire.Les groupes terroristes, eux, sont arrivés dans l’extrême sud de la Libye où ils ont dégradé des vestiges avec de la peinture noire. Il s’agit d’un patrimoine préhistorique. Je ne comprends pas cette logique de destruction», a soutenu l’expert de l’Unesco. «J’ai travaillé sur le projet des anciennes civilisations dans les vallées en Libye. Nous avons publié deux volumes sur l’agriculture dans les anciens temps en Libye où l’on cultivait les olives et les céréales. Aujourd’hui, ces terres sont devenues désertiques», a-t-il souligné. Il a évoqué aussi l’attaque terroriste contre le Musée du Bardo à Tunis.
Le barrage de Marib ciblé au Yémen
Il a regretté l’attaque contre le barrage de Marib au Yémen. Ce barrage, construit vers 700 ans avant Jésus Christ, est cité dans Sourate Saba’a dans le Coran. Il est considéré comme le plus ancien barrage hydraulique du monde. Vers 570, le barrage s’était rompu détruisant les systèmes d’irrigation entraînant l’effondrement du Royaume de Himyar qui était un puissant rival des Royaumes de Hadramaout et de Saba’a. «Le barrage de Marib a été attaqué alors qu’il n’a aucune importance stratégique ou militaire. Même le centre-ville de Sana’a, qui est portée sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco, a été ciblé. Autant que la ville de Taiz», a noté Mounir Bouchenaki.
La douloureuse destruction des statuts de Bâmiyan
Sous-directeur de la culture à l’Unesco, Mounir Bouchenaki devait affronter un immense problème en 2001. «Le 28 février 2001, j’étais ici à Alger avec Koichiro Matsuura, DG de l’Unesco. J’étais dans le salon de la présidence de la République dans l’attente d’une audience avec le chef de l’Etat quand on m’a informé par téléphone que le Mollah Omar voulait détruire les statuts de Bâmiyan en Afghanistan après l’Aïd El Adha. La période entre le 28 février et le 9 mars fut pénible pour moi. A Paris, nous avons fait réunir les représentants de tous les pays musulmans à l’Unesco pour empêcher le Mollah Omar d’exécuter son projet. J’ai contacté Lakhdar Ibrahimi qui m’a dit qu’il ne voulait pas parler avec les Taliban. J’ai pris attache ensuite avec Pierre La France, qui était ambassadeur de France à Islamabad et enseignant à l’Institut des langues orientales. Il est parti à Kandahar où il a été reçu par des ministres des Taliban. Il m’a appelé pour me dire que les Taliban ne veulent pas d’argent, ni une reconnaissance de l’ONU. Il lui ont dit que c’est une question de religion», a-t-il expliqué. Il a alors organisé un rendez-vous téléphonique entre le DG de l’Unesco, lui-même, bouddhiste, avec le président égyptien Hosni Moubarek. Un comité religieux a été alors composé notamment du Mufti de l’Egypte, du cheikh Al Azhar et de Youssef El Karadhaoui. «Les savants ont été mal reçus par les Taliban. Ils leur ont dit qu’ils étaient vendus à l’Amérique. J’ai eu un dialogue avec un représentant des Taliban, à travers Al Jazeera, qui m’a fait le reproche de s’intéresser au patrimoine afghan et d’oublier El Qods. Je lui ai répondu que j’étais en charge du dossier El Qods à l’Unesco pour la sauvegarde du patrimoine en concertation avec les autorités musulmanes et chrétiennes», a-t-il expliqué. Il a pris attache avec le gouvernement du Pakistan pour essayer de dissuader les Taliban d’exécuter le projet. «Le Mollah Omar a dit au ministre de l’Intérieur du Pakistan que l’ordre venait de Dieu et qu’il ne pouvait rien faire. Les statuts ont été malheureusement détruites», a-t-il regretté. Les Bouddhas de Bâmiyân étaient trois grandes statues (entre 35 et 55 mètres de hauteur) excavées dans une falaise, au centre de l’Afghanistan, à plus de 200 km au nord de Kaboul. Situé sur la Route de la soie, Bâmiyân était un centre religieux bouddhiste vers le IIe siècle. Selon lui, l’Unesco ne peut pas intervenir pendant le déroulement des conflits parce qu’elle n’a pas une armée. «Nous n’avons pas d’armes. Nous devons compter soit sur les armées nationales, soit sur les forces des Nations unies», a-t-il dit. Il a rappelé qu’après les conflits, les gouvernements doivent régler plusieurs problèmes comme ceux des blessés, des réfugiés, des habitations démolies et de la remise en état des infrastructures. Le patrimoine n’est, selon lui, qu’un aspect, mais souvent, il est considéré comme essentiel pour l’identité de la population.
Bombardement de Dubrovnik et de Mostar
En 1991, Dubrovnik, une ville classée au patrimoine mondial, a été bombardée en ex-Yougoslavie. L’affaire a fait un grand bruit dans le monde. «La ville a été très touchée par le conflit aux Balkans. L’Unesco a envoyé une mission. J’ai pu rencontrer le maire de la ville. C’était en hiver. La première chose qu’il fallait faire était de couvrir les monuments. Une société a fabriqué des tuiles rouges pour mettre à l’abri les principaux monuments, pas tous malheureusement», s’est souvenu l’expert algérien.Dubrovnik, qui est située en Croatie, a été attaquée en octobre 1991 par l’Armée populaire yougoslave et des milices monténégrines et serbes. Le siège de la ville a duré presque dix mois. Deux ans après, la ville de Mostar, en Bosnie Herzégovine, fut également une cible lors de la guerre des Balkans. Stari Most, le vieux pont, construit par les Ottomans, a été détruit le 9 novembre 1993 par les Croates. «Je suis parti à Mostar avec l’armée espagnole. J’ai porté une tenue para militaire avec le directeur du patrimoine du conseil de l’Europe. En 1994, le pont de Mostar a été détruit. C’était un pont piétonnier. Donc, il n’avait aucune valeur stratégique ou militaire. Le pont a été détruit pour une raison purement idéologique, parce qu’il fallait rompre le lien qui existait entre Mostar Est et Mostar Ouest.Nous avons travaillé sur le projet à la demande des autorités bosniaques. Elles nous ont dit que la reconstruction du pont était une prioritaire en raison de sa valeur symbolique», a souligné Mounir Bouchenaki. La reconstruction s’est déroulée de 1995 à 2004 et le quartier du Vieux pont de la vieille ville de Mostar a été classé sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. «Je me rappelle que les Bosniaques m’ont proposé de me donner la nationalité bosniaque ! La reconstruction du pont de Mostar a été un moment très important. Elle a posé beaucoup de problèmes techniques, d’architecture et de structures. L’équipe technique était composée d’ingénieurs croates, bosniaques et un architecte serbe. Nous voulions montrer que l’Unesco veut travailler à travers ce monument à la réconciliation des populations qui ont été déchirées par la guerre», a-t-il relevé. Mounir Bouchenaki s’est également rendu à Sarejvo et à Vukovar. «A Vukovar, j’ai été reçu par le prêtre orthodoxe. Il m’a fait visiter l’Eglise catholique. Les deux églises étaient dans un mauvais état. Les belligérants se sont battus, chacun cherchant de détruire le vestige de l’autre. C’était le grand changement dans les conflits», a-t-il dit. En novembre 1991, à Vukovar, les troupes serbes ont commis des exactions et des massacres massifs. Même les blessés n’ont pas été épargnés dans les hôpitaux. La ville a été attaquée avec plus de 1200 obus ! «Nous avons commencé à tirer les leçons déjà, à la fin des années 1990. On s’est rendu compte que la Convention de 1954 n’était pas applicable. Nous ne pouvions pas envoyer une lettre aux parties en conflit pour leur demander de respecter le patrimoine culturel», tient à préciser le responsable de l’Unesco.
L’incroyable résistance du Musée de Beyrouth
Mounir Bouchenaki a mené une délégation d’experts de l’Unesco au Liban au début des années 1991 pour constater les dégâts. «Nous avons visité le centre-ville de Beyrouth entièrement détruit. Nous avons visité Tyr, Byblos, Anjar et Tripoli, puis visité le Musée national de Beyrouth où nous avons constaté une véritable catastrophe à l’intérieur. Le Premier ministre Omar Karamé m’a reçu pour me dire comment l’Unesco peut aider le Liban. Je lui ai répondu que l’Unesco élabore un plan et il revient au gouvernement libanais de préciser les priorités. M. Karamé m’a dit que le Musée de Beyrouth était une priorité parce qu’il se trouvait au niveau de la ligne de démarcation. Après les Accords de paix de Taif, nous avions immédiatement commencé à faire l’état des lieux. Nous avions travaillé avec le British Museum, le Musée du Louvre, le Japon. Nous avions formé des restaurateurs pour reprendre les objets qui ont pu être conservés», a-t-il souligné. A l’époque, les Libanais ont eu l’idée géniale de mettre les sarcophages et les mosaïques sous des caissons en béton pour les protéger des bombardements. «Le directeur des antiquités avait muré les réserves. Les murs étaient peints, personne ne pouvait savoir que les réserves étaient derrière.C’est ce qui a manqué au Musée de Baghdad. En 2006, les avions israéliens avaient bombardé tout le Liban. Je suis revenu en chef de mission pour élaborer un rapport sur les dégâts commis sur le patrimoine. Les bombardements ont provoqué des dégâts collatéraux sur le patrimoine comme le site de Tyr», a révélé Mounir Bouchenaki. Le Musée national de Beyrouth, qui compte dans sa collection plus de 100 000 objets et œuvres, a été rouvert en 1998.Le Musée a dans sa collection des sarcophages anthropoïdes, des stèles phéniciennes, des objets qui remontent à l’âge de bronze. M. Bouchenaki a regretté que beaucoup des petits objets d’art ont disparu. «C’est l’un des sujets sur lequel nous travaillons actuellement», a-t-il révélé. Aussi, il a fait part de la réunion du G7, qui se tient depuis hier jeudi à Florence, en Italie, pour débattre du trafic illicite des œuvres d’art et de la sauvegarde du patrimoine culturel. Le G7, pour rappel, réunit le Japon, les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l’Allemagne, la France, le Canada et l’Italie.C’est la première fois depuis sa création que le G7 consacre une réunion liée aux questions culturelles. Mounir Bouchenki est justement à Florence pour intervenir sur le trafic illicite. «J’en ai beaucoup parlé lorsque j’étais directeur de l’ICCROM (Centre international d’études pour la conservation et la restauration des biens culturels) à Rome. J’ai mis en contact l’ambassadeur d’Algérie en Italie avec les responsables des Carabiniers pour la protection du patrimoine culturel, la seule armée au monde consacrée au patrimoine. Un contact a été établi entre cette section de l’armée italienne et la Gendarmerie nationale aux fins de profiter de ses 40 ans d’expérience dans la lutte contre le trafic illicite des œuvres d’art», a-t-il relevé. Il a annoncé l’organisation à Alger, en septembre 2017, d’un atelier entre experts africains et arabes pour étudier les techniques de préparation de dossiers en vue de classement des sites et monuments dans la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. L’atelier sera organisé par les deux centres de l’Unesco du Bahrein et de l’Afrique du Sud. «La région arabe, qui s’étale de Oman jusqu’au en Mauritanie et qui est le berceau des civilisations les plus anciennes, ne compte que 67 sites classés alors que l’Italie, à elle seule, a 52 sites portés sur la liste de l’Unesco», a-t-il noté.
Protection du patrimoine : le Conseil de sécurité adopte une résolution historique
Le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté, le 24 mars 2017, la résolution 2347 sur la protection du patrimoine. Une résolution qualifiée d’historique par l’UNESCO. «La destruction délibérée du patrimoine est un crime de guerre, elle est devenue une tactique de guerre pour mettre à mal les sociétés sur le long terme, dans une stratégie de nettoyage culturel. C’est la raison pour laquelle la défense du patrimoine culturelle est bien plus qu’un enjeu culturel, c’est un impératif de sécurité, inséparable de la défense des vies humaines », a déclaré Irina Bokova, directrice de l’Unesco. Elle a intervenu au niveau du Conseil sur la destruction et le trafic de biens culturels par les groupes terroristes et dans les situations de conflit armé. «Les armes ne sont pas suffisantes pour vaincre l’extrémisme violent. Bâtir la paix passe aussi par la culture ; cela passe par l’éducation, la prévention et la transmission du patrimoine. C’est tout le sens de cette résolution historique», a expliqué Irina Bokova. C’était la première fois qu’un directeur général de l’Unesco était invité à informer les membres du Conseil de sécurité des Nations unies lors d’une séance publique. La séance s’est tenue à l’initiative de la France et de l’Italie.

Mounir Bouchenaki
Mounir Bouchenaki a entamé sa carrière dans les années 1960 avec des fouilles à Tébessa, Sétif , Cherchell et Tipasa. Après un passage au ministère de la Culture, il a entamé une carrière internationale en 1981 à l’Unesco. Au début, il a suivi deux projets : la création d’un Musée national à Tripoli en Libye et la création d’un Musée à Ryad, en Arabie Saoudite.
Ces quarante dernières années, il a été en charge des nouveaux problèmes apparus à cause des conflits armés et qui ont porté atteinte au patrimoine culturel mondial. Ancien membre de l’Institut archéologique allemand, Mounir Bouchenaki a occupé plusieurs postes à l’Unesco dont celui de directeur de la division du patrimoine culturel et directeur de la culture. Il a dirigé également le Centre international d’études pour la conservation et la restauration des biens culturels (ICCROM). Il a mené en tant qu’expert des missions dans plusieurs pays. Il siège au comité du patrimoine (qui classe les sites dans la liste mondiale) de l’Unesco.

Fayçal Métaoui




 

Similar threads

Retour
Haut